Le Musée Yves Saint-Laurent Paris présente "Yves Saint-Laurent : Transparences, le pouvoir des matières", une occasion en or pour découvrir le processus créatif de l'un des designers les plus connus au monde.
Pour cette deuxième partie, le musée parisien concentre son exposition sur la transparence en tant qu'expression artistique privilégiée d'Yves Saint-Laurent.
La transparence, lorsqu'elle est portée, est théoriquement incompatible avec la fonction même du vêtement, censé couvrir, dissimuler ou protéger le corps. Attiré par le pouvoir suggestif de la transparence, et à cette contradiction, Yves Saint-Laurent a commencé à utiliser des matières telles que la mousseline, la dentelle et le tulle dès les années 1960. Comme un motif récurrent, la transparence revient tout au long de ses quarante ans de création, parfois associée à des broderies ou des tissus opaques. Avec audace, il a réconcilié les antagonismes, permettant aux femmes d'affirmer leur corps avec fierté et insolence.
"Les transparences, je les connais depuis longtemps. L'important, avec elles, c'est de garder le mystère... Je pense avoir fait le maximum pour l'émancipation des femmes," a déclaré Yves Saint-Laurent.
S'appuyant sur le pouvoir des matières, cette nouvelle exposition vise à explorer la mode et la vision d'Yves Saint-Laurent dans toute leur complexité : en examinant de près leur relation avec le corps et la nudité.
Parmi les quarante pièces textiles exposées se trouvent des créations emblématiques de l'histoire de la révélation du corps féminin dans l'œuvre d'Yves Saint-Laurent, telles que la première blouse seins nus, renommée "See-Through Blouse" par la presse américaine, de la collection printemps-été 1968, ou la robe Nude Dress, une robe de mousseline noire ornée de plumes d'autruche de la collection suivante.
Des pièces plus rares témoignent de la virtuosité du couturier pour présenter une figure féminine puissante et libérée. Pour compléter cela, des éléments essentiels du processus créatif sont présentés : croquis, patrons sur calque, photographies, ainsi que des accessoires, et une série de dessins inspirés par les tableaux de Goya.
En écho aux créations d'Yves Saint-Laurent, des œuvres d'artistes modernes et contemporains ponctuent l'exposition. Les dessins hypnotiques d'Anne Bourse évoquent les superpositions de matières et de couleurs ; les expérimentations autour des rayogrammes et des photos de mode de Man Ray rappellent les recherches d'Yves Saint Laurent sur la dentelle ; la fluidité de la mousseline et de son mouvement se retrouve dans la danse serpentine de Loïe Fuller captée par les frères Lumière ; enfin, une œuvre de la série des Transparences de Picabia révèle la part visible et invisible du modèle, la part insaisissable de sa persona.
L'exposition "Yves Saint Laurent : Transparences, le pouvoir des matières" est articulée autour de cinq sections.
La première propose une introduction aux matières, explorant plusieurs pièces réalisées en organza, en dentelle, en tulle ou en mousseline, permettant au couturier de jouer avec différents effets de transparence.
La section suivante dévoile progressivement le corps féminin à travers des transparences ajourées, utilisant de la dentelle et du tulle pour abstraire certaines parties du corps, comme si elles étaient éclairées par des projecteurs.
Dans la troisième section, l'exposition aborde la fluidité du mouvement générée par des tissus souples, comme la mousseline, qui animent, couvrent et découvrent le corps, l'accompagnant comme un double, une brume onirique. Dans les ateliers de couture dits "flous", par opposition à ceux des "tailleurs", la transparence offre une totale liberté au corps.
Plus loin, la transparence révèle les lignes de construction d'un vêtement - notamment en organdi - permettant de structurer le corps, comme en témoignent les patrons sur calque présentés pour la première fois.
En fin de parcours, plusieurs silhouettes de mariées avec leur voile de tulle, si souvent réinventé par Yves Saint-Laurent, viennent clôturer l'exposition, comme elles le font dans chaque défilé. Les mariées d'Yves Saint-Laurent ne sont jamais transparentes : elles affirment leur liberté dans une liberté insondable.
Cette exposition rend visible la poésie artistique et sensible d'Yves Saint-Laurent ; sa rébellion créative contre les interdits mouvants de la société reste plus inspirante que jamais aujourd'hui.
Jusqu'au 25/08/2024. Ouvert tous les jours de 11h à 18h, sauf le lundi. Nocturne le jeudi jusqu’à 21h.
Photo ©Roberto Martinez